Oppidum*

Quinze jours se sont écoulés avant que je me décide à faire le premier cliché. Quinze jours à travailler tous les matins à la bibliothèque du Centre Pompidou, à répéter les mêmes gestes, et surtout à ressentir la même fascination du vide surréel. Quelle agréable étrangeté de se retrouver dans cet espace d’ordinaire surpeuplé. Silencieux. Découvrir tous les matins les livres abandonnés sur les tables, les chaises déplacées, les notes oubliées, les petits déchets épars. Autant de présences fantomatiques.
Arriver en avance. Avant de ranger les livres, prendre deux ou trois photos. C’est devenu un rituel. Le procédé technique s‘est vite imposé, j’ai opté pour l’image du hasard : le sténopé, pour être plus près de la réalité que la photographie composée et nettement définie.
Chaque jour, j’ai noté sur un carnet les temps de pose nécessaires. La première pellicule s’est révélée totalement sous-exposée. Il m’a fallu réajuster, expérimenter, réparer ma boite à la suite d’une chute accidentelle. De l’inattendu sont nées de bonnes surprises, comme cette surimpression de l’image de l’entrée du centre Pompidou et de la bibliothèque saisie dans l’urgence du matin, en secret, loin des regards.